Nano Banana, l’IA d’images de Google : gadget fruité ou vrai game changer ?

Article rédigé par Jabeur JAAFAR

Quand l’IA bouscule la création visuelle (spoiler : les designers survivent) 

“Nano Banana”. Google lance un nouveau modèle d’édition d’images… avec un nom de dessert pour enfants. Bienvenue dans l’IA en 2025.  

Mais ne vous fiez pas à la blague : derrière ce surnom qui donne faim se cache Gemini 2.5 Flash Image, une techno qui change la façon dont on édite et génère des visuels. Intégré à l’app Gemini et accessible via l’API Google AI Studio, le modèle brille là où ça coinçait souvent : cohérence d’un visage à travers les éditions, fusion intelligente de plusieurs images, et compréhension fine d’instructions en langage naturel. 

Alors, simple effet d’annonce ou véritable game-changer ?  On a épluché le sujet. 

Cet article analyse Nano Banana (Gemini 2.5 Flash Image), sorti en août 2025.

Depuis le 20 novembre 2025, Google a lancé Nano Banana Pro (Gemini 3 Pro Image), une version améliorée qui corrige plusieurs des limites présentées ici, notamment :  

  • Rendu de texte nettement amélioré
  • Meilleure compréhension multilingue

L’analyse technique ci-dessous reste valable pour comprendre les fondamentaux de l’architecture.

Nano Banana : le nouveau champion de l’édition d’images 

Pourquoi maintenant ? 

L’édition d’images par IA n’est pas née hier. Midjourney, DALL-E 3, Stable Diffusion ont popularisé la génération, mais un problème persistait : la cohérence. À chaque modification, la scène ou le visage se réinventaient, pratique pour explorer, catastrophique pour produire des séries homogènes.  

C’est exactement ce problème que résout Gemini 2.5 Flash Image : éditer de façon itérative en préservant l’identité visuelle (personnes, animaux, objets) tout en comprenant des instructions en langage naturel (Oui, même quand elles sont rédigées avant le café)

Le modèle est accessible via trois canaux : l’app Gemini pour tester rapidement, Google AI Studio (API) pour l’intégrer dans vos produits, et Vertex AI pour les déploiements entreprise. 

Classé n°1… et ça ne doit rien à son nom 

Côté résultats publics, Nano Banana occupe la première place de l’Image Edit Arena de LMArena, la plateforme de référence qui compare les modèles IA via votes communautaires en conditions réelles d’utilisation (classement au 6 novembre 2025). 

Concrètement, cela signifie qu’en moyenne, le modèle affiche une meilleure cohérence de personnage, une compréhension plus fine des consignes et une qualité perçue supérieure sur les tâches d’édition multi-tours. 

Le comparatif de l’édition d’images : 

  • DALL-E 3 (OpenAI) : excellent en génération “from scratch”, mais l’édition itérative reste moins prévisible 
  • Midjourney v6 : qualité artistique remarquable, mémoire d’un poisson rouge entre les prompts 
  • Flux/FLUX.1 (Black Forest Labs) : rapide et open-source (poids/éditions disponibles selon licences), avec une consistance de personnages plus variable 
  • Nano Banana : le seul à vraiment exceller sur l’édition cohérente multi-tours, et oui, avec ce nom-là 

Une approche différente 

Là où la plupart des modèles régénèrent l’image à chaque prompt, Nano Banana édite l’image existante et conserve le contexte d’une opération à l’autre. La nuance semble subtile, mais elle change tout dans l’usage quotidien. 

En pratique : 

Approche classique (Midjourney, DALL-E) : 
Prompt → Image A → Nouveau prompt → Image B (souvent très différente de A)  

Approche Nano Banana
Image de base → Édition 1 → Édition 2 → Édition 3… avec cohérence maintenue à chaque étape 

C’est cette architecture qui permet un véritable workflow itératif, proche de la retouche manuelle classique, sans les “coups de gomme” de panique

Bon, vous savez maintenant ce qu’est Nano Banana et pourquoi il cartonne sur les classements. Mais concrètement, comment on s’en sert ? Parce qu’entre “n°1 de l’Image Edit Arena” et “comment ça marche”, il y a un monde. 

Comment ça fonctionne : anatomie d’une génération cohérente 

Sous son nom de smoothie tropical, Nano Banana (Gemini 2.5 Flash Image) cache une architecture sérieuse : un modèle multimodal qui fusionne texte et image dès l’entrée du pipeline, et non comme deux flux séparés qu’on recolle après coup. C’est cette conception “native multimodale” qui lui permet de comprendre ce qu’il voit et ce qu’on lui demande dans un même espace de représentation. 

1. Un cerveau commun texte-image 

Tout commence par un double encodage unifié : 

  • Le texte du prompt est transformé en embeddings linguistiques via un transformer semblable à celui d’un LLM, créant des vecteurs de plusieurs milliers de dimensions qui capturent le sens sémantique. 
  • L’image d’entrée (ou les images de référence) est passée dans un encodeur visuel, probablement dérivé d’un Vision Transformer (ViT), qui découpe l’image en patchs de 16×16 pixels et les convertit en tokens visuels. 

Les deux flux sont ensuite alignés dans le même espace latent grâce à des couches de cross-attention : chaque token texte peut “regarder” les patchs visuels correspondants et inversement. Ce mécanisme d’attention croisée calcule des scores de similarité entre modalités. Résultat : le modèle comprend littéralement que “le blazer sombre” fait référence à une zone précise de pixels, et que “garde le visage” implique de figer certains vecteurs dans ce latent space tout en permettant la modification du reste. 

2. Le cœur : une diffusion conditionnée 

Comme beaucoup de modèles modernes, Nano Banana repose vraisemblablement sur un générateur par diffusion (type Denoising Diffusion Probabilistic Model), méthode dominante pour l’édition d’images guidée. Mais au lieu de partir d’un bruit gaussien aléatoire, la génération est conditionnée par l’image d’origine et par le contexte multimodal. 

Chaque étape de débruitage (typiquement 10-40 passes itératives) tient compte : 

  • des embeddings texte+image fusionnés (le “quoi faire”), 
  • d’un masque d’attention implicite des zones à modifier (le “où agir”), 
  • et d’une rétroaction des précédentes itérations pour maintenir la continuité visuelle via un mécanisme de guidance. 

On parle alors de diffusion guidée contextuelle : l’image n’est pas recréée from scratch, mais corrigée progressivement dans l’espace latent en minimisant la distance entre l’état actuel et l’objectif sémantique. 

3. Un apprentissage sur la cohérence 

Le modèle a été entraîné sur des paires (image ↔ texte ↔ édition) issues de millions d’exemples : modifications localisées, changements de style, retouches progressives. Cette supervision mixte (texte + image + différences pixel-level) apprend à préserver la structure et l’identité des visages ou objets à travers plusieurs passes. 

Techniquement, cela nécessite un fine-tuning spécifique sur des datasets d’édition où la même entité (personne, objet) apparaît avec des variations contrôlées. C’est ce qui donne à Nano Banana sa fameuse “character consistency”, une capacité encore rare chez ses concurrents qui régénèrent souvent l’image entièrement à chaque prompt. 

4. L’itération comme design de base 

L’architecture intègre un mécanisme de mémoire latente : à chaque édition, les embeddings mis à jour sont réinjectés dans le modèle via un cache contextuel, permettant d’enchaîner plusieurs tours sans repartir de zéro. Autrement dit, le modèle ne voit pas “une suite de prompts indépendants”, mais une conversation continue entre texte et image. 

Ce contexte persistant maintient une fenêtre quelques dernières générations, créant un fil narratif visuel. C’est ce qui permet d’ajouter un détail, changer un fond, ou corriger la lumière sans perdre l’identité du sujet. La limite : au-delà de 10-15 éditions, l’accumulation d’erreurs numériques provoque un character drift progressif. 

5. Sortie et sécurité 

Une fois la diffusion stabilisée (convergence de la fonction de perte), l’image est décodée depuis l’espace latent vers le format RGB via un décodeur neuronal. Chaque sortie est ensuite filigranée via SynthID, un système de watermarking invisible intégré dans les coefficients fréquentiels de l’image pour certifier qu’elle provient bien d’un modèle Google DeepMind. 

Le pipeline complet peut être invoqué via l’app Gemini, l’API Gemini ou Vertex AI, avec la même architecture sous-jacente déployée sur TPU Pods (clusters de Tensor Processing Units optimisés pour l’inférence). 

En résumé 

Nano Banana n’est pas “un générateur avec un prompt”, c’est un modèle de compréhension et de réécriture d’image multimodale. En fusionnant texte et image dans un espace latent partagé, il peut appliquer des modifications ciblées avec cohérence, mémoire et contrôle sémantique, trois qualités rarement réunies dans la génération visuelle actuelle. La clé : une architecture qui traite l’édition comme une conversation, pas comme une suite de générations isolées. 

Voilà pour la théorie. Maintenant, la réalité : même avec une architecture aussi élégante, Nano Banana a ses points de friction. 

Les limites (et pourquoi elles existent) 

Nano Banana est impressionnant, mais pas magique. Même une IA entraînée sur des millions d’images reste soumise aux lois de la physique… et du machine learning. Voici les principales limites, et surtout pourquoi elles ne disparaîtront pas avec un simple patch. 

1. Le texte dans les images 

Problème observé : impossible d’ajouter ou d’éditer du texte de manière fiable. 
Explication technique : le texte est symbolique, pas visuel. Les modèles de génération d’images s’appuient sur des régularités statistiques : un visage, un arbre, une ombre ont des structures visuelles cohérentes. Mais une lettre ? Le “A” manuscrit, Arial ou gothique : des milliers de formes, un seul concept.

Les tokens visuels utilisés par les modèles de diffusion ne sont pas conçus pour encoder des symboles typographiques. Lorsqu’ils rencontrent du texte dans les données d’entraînement, ils le perçoivent comme une texture, pas comme une séquence porteuse de sens. Résultat : “Hello” devient souvent “Helo”, “H3llo”, ou un motif aléatoire vaguement lisible.

C’est pour cela que les générateurs spécialisés (comme Ideogram ou Firefly 3) utilisent des modules linguistiques séparés pour traiter le texte. 

2. Les groupes nombreux 

Problème observé : au-delà de 6 personnes, impossible d’en ajouter d’autres ; la photo reste inchangée ou les visages se déforment, surtout à l’arrière-plan. 

Expérience réelle : j’ai testé en demandant à Nano Banana d’ajouter ma photo à une image d’équipe (6 collègues). Résultat : l’image générée est identique à l’originale. Le modèle a tout simplement ignoré la requête.

Explication technique : c’est une limite structurelle du mécanisme d’attention des Transformers. 
Chaque pixel généré “regarde” tous les autres pour déterminer les zones pertinentes. Plus il y a de visages distincts, plus cette matrice d’attention devient complexe.

 Sur une image 1024×1024, on parle déjà de centaines de milliers de tokens de patchs. Chaque nouvelle personne ajoute des entités à suivre et donc des relations supplémentaires à calculer.

Résultat : l’attention se dilue. Là où un modèle peut accorder 80 % de ses ressources à un seul visage, il doit en répartir 10 à 15 % par tête dans un groupe de huit. Les traits s’aplatissent, les expressions deviennent instables, et dans certains cas (comme mon test), le modèle préfère ne rien changer plutôt que de produire un résultat incohérent.

C’est une limite quadratique : si on double le nombre d’entités, on quadruple la complexité. D’où la recommandation implicite : rester sous la barre des six personnes pour des résultats visuellement fiables. 

3. Les prompts complexes en français 

Problème observé : un même prompt détaillé donne des résultats différents selon la langue utilisée. 
Exemple concret : 

  • En anglais : 

“Recreate the person in four different camera perspectives. Keep identity, body proportions, and clothing consistent. Environment: jungle with photorealistic lighting, natural shadows, high-definition. Generate four variations: bird’s-eye view, rear view, side profile, close-up portrait.”


Résultat : quatre vues nettes, parfaitement cohérentes dans une seule image.

  • En français (traduction exacte) : 

“Créer 4 vues de cette même personne sous différents angles de caméra. Conserver exactement la même identité, proportions du corps et tenue vestimentaire. Décor : jungle avec éclairage photoréaliste, ombres naturelles, haute définition. Les 4 perspectives : plongée verticale, contre-plongée arrière, profil latéral, gros plan portrait.”


Résultat : une seule vue générée : superbe, mais pas quatre. 

Explication technique : le biais linguistique du dataset. Le modèle a été pré-entraîné principalement sur des paires image-texte en anglais


Lorsqu’un prompt est court, la traduction implicite vers l’espace d’embeddings anglophone se passe bien. Mais dès qu’on ajoute des instructions longues ou hiérarchisées (plus de 40–50 tokens linguistiques), le risque de dégradation augmente : certaines parties du message sont perdues ou mal pondérées.


C’est un problème d’alignement sémantique : les embeddings français sont plus clairsemés dans l’espace latent, donc plus “flous”. Le résultat : moins de cohérence sur les prompts complexes.


Astuce empirique : écrire en anglais, ou reformuler les prompts français en phrases plus simples améliore considérablement la compréhension. 

Que retient-on ?

Nano Banana excelle dans la cohérence visuelle et la compréhension multimodale, mais il hérite des limites structurelles des modèles de diffusion : 

  • pas conçu pour le texte pur, 
  • attention finie sur les scènes surpeuplées, 
  • biais linguistique sur les langues minoritaires. 

Ces limites sont des contraintes mathématiques inhérentes aux architectures actuelles. Ce qui n’empêche pas Nano Banana d’être le premier modèle à vraiment résoudre la character consistency sur éditions multiples, un pas de géant dans la génération visuelle conversationnelle. 

Bref, même la banane la plus brillante ne peut pas tout faire, mais elle sait très bien où elle est forte. 

Nano Banana : le bilan

Nano Banana marque un tournant dans l’évolution de l’IA visuelle : l’édition devient enfin un processus fluide, maîtrisable, presque naturel. On peut débattre de ses limites, de ses biais linguistiques ou des contraintes propres aux modèles de diffusion, mais une chose est sûre : on ne “génère” plus une image, on collabore avec elle. On la fait progresser, étape par étape, comme avec un designer.

Certaines limites que nous avons identifiées (ajout de texte, multilinguisme) n’ont pas échappé à Google. Le 20 novembre 2025, soit quelques mois après Nano Banana, Google a dévoilé Nano Banana Pro (Gemini 3 Pro Image), qui s’attaque directement à ces points de friction.

Et Google ne remplace pas : il segmente. 

Le modèle original reste accessible gratuitement (avec quotas), tandis que Nano Banana Pro cible les usages professionnels (0,13$ à 0,24$ en API).  

Mais avant d’en arriver là, comment se comportait l’original sur le terrain ? Rendez-vous dans vous dans le prochain article pour les tests grandeur nature. 🍌 

La banane mûrit vite. Très vite. 

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